mardi 6 juin 2017

IMMUNOTHERAPIE ET CANCER DU POUMON (Dr J.Badreddine)



Plusieurs étapes sont requises pour le système immunitaire pour attaquer efficacement les cellules tumorales


Il s’agit dans l’ordre :

1/ Reconnaître la tumeur

2/ Présentation de l’antigène tumoral aux cellules T

3/ Activation des cellules T

4/ Attaque directe de la tumeur



1/ L’IMMUNO RECONNAISSANCE est initiée par les cellules présentatrices de l’antigène ou APC ( ANTIGEN PRESENTING CELLS) : Il s’agit des cellules dendritiques via les molécules de MHC ou MAJOR HISTOCOMPATIBILITY COMPLEX lesquelles sont exprimées à la surface des APC.

Ce processus déclenche l’expression de B7.1  et  de B7.2 au niveau des APC qui migrent aux ganglions lymphatiques.


2/ et 3/Dans le ganglion, les APC présentent l’antigène tumoral aux cellules T qui sont « au repos », via l’interaction avec le récepteur Ag-spécifique de la cellule T.



En plus, s’il existe une interaction entre le B7.1 et le B7.2 et le CD28 sur la cellule T, l’activation de la cellule T intervient et celle-ci quitte alors le ganglion lymphatique.


4/ Lorsque la cellule T arrive au contact de la tumeur et reconnaît l’antigène exprimé sur la tumeur en association avec le MHC, elle libère des enzymes cytolytiques (PERFORIN ET GRANZYM), ainsi que les cytokines et recrute en même temps d’autres membres du système immunitaire et ainsi prolifèrent. 

Le résultat est donc la destruction de la tumeur et la création des cellules T dites « mémoires ».

Il s’agit du même processus utilisé par le système immunitaire lorsqu’il s’attaque à d’autres processus pathologiques comme par exemple dans les infections dues aux virus


Plusieurs « points de contrôle » existent pour affaiblir la réponse immunitaire et ceci dans le but de protéger contre l’inflammation préjudiciable ou nocive et l’auto immunité.


En ce qui concerne la malignité, de tels points de contrôle sont co optés par les tumeurs, entrainant ainsi ce qu’on appelle une tolérance immunitaire et par conséquent un échappement et une progression de la malignité tout en acquérant des mutations.


Deux points de contrôle caractéristiques qui constituent chacun une cible dans les carcinomes non à petites cellules (CNPC) du poumon, étudiés lors des essais cliniques, sont le CTLA-4 (CYTOTOXIC T LYMPHOCYTE ANTIGEN-4) et le PD-1 (PROGRAMMED DEATH RECEPTOR-1)


LE CTLA-4 intervient précocement  dans l’activité de la cellule T (ou phase d’amorçage). Il est surexprimé sur la cellule T après exposition de celle-ci à l’antigène.

En plus, en rentrant en compétition avec le CD28 par sa liaison avec le B7.1 et le B7.2 avec une affinité supérieure, il délivre ainsi un signal négatif à la cellule T, réalisant un blocage au signal co stimulateur ; ce dernier étant le résultat de l’interaction avec le complexe B7.1/B7.2/CD28 qui est nécessaire à l’activation de la cellule T.


LE PD-1 agit comme inhibiteur au niveau du site de la tumeur (phase effectrice), à la différence donc de CTLA-4 lequel fonctionne largement au niveau des organes lymphoides.

Le PD-1 est surexprimé sur les cellules T activées et lors de la reconnaissance de la tumeur via le récepteur présent sur la surface de la cellule T, l’engagement de PD-1 avec son ligand le PD-L1, il induit une inactivation du lymphocyte T .

Un des premiers mécanismes connus de l’expression de PD-L1, est celui du processus inflammatoire dans le micro environnement tumoral en grande partie induit par l’INTERFERON GAMMA.

 Un autre mécanisme possible de l’expression de PD-L1 est d’ordre mutationnel au niveau de la tumeur, indépendamment de l’inflammation tumorale.



L’ACTIVATIONDES POINTS DE CONTRÔLE IMMUNITAIRE INCLUANT LE CTLA-4 ET LE PD-1 /PD-L1, ATTENUE L’AMPLITUDE DU RECEPTEUR T OU TCR, AU NIVEAU DE LA CELLULE TUMORALE




ANTICORPS ANTI-PD1 ET ANTI-PDL1


L’évaluation des anticorps anti PD-1  et anti PD-L1 est fonction de l’interaction distincte ligand/récepteur : PD-1/PD-L1 ou PD-L2,  PD-L1/B7.1 ; cette dernière interaction étant également connue comme inhibitrice, entrainant une inactivation de la cellule T .


L’effet inverse est aussi vrai pour le PD-L1 inhibant ainsi l’apoptose de la cellule tumorale.




LES ANTICORPS BLOQUANTS PD-1 :


1/NIVOLUMAB : Ac Antagoniste Monoclonal IgG4 à PD-1 :

Utilisé dans les CNPC du poumon, épidermoides et non épidermoides, à un stade avancé ayant progressé après chimiothérapie standard à base de Platine (indépendamment de l’expression de PD-L1 dans la tumeur).


PEMBROLIZUMAB : Ac Antagoniste Monoclonal IgG4 à PD-L1

Utilisé en première ligne si plus ou égal à 50% des cellules tumorales exprimées en IHC (22C3 Dako)



ATEZOLIZUMAB : Ac Antagoniste IgG1 à PD-L1 

Utilisé dans les CNPC métastatiques dont la maladie a progressé pendant et après chimiothérapie à base de Platine.

Les patients ayant des altérations génétiques EGFR ou réarrangement ALK, doivent avoir une progression de leur maladie pour bénéficier de ce traitement.


DURVALUMAB : Ac Antagoniste IgG1 à PD-L1


BMS-936559 : Ac Antagoniste humanisé IgG4 à PD-L1



ANTICORPS ANTI CTLA-4 : IPILIMUMAB : Ac Monoclonal IgG1

Prolonge la survie chez les patients ayant un mélanome métastatique.




EN RESUME :


1/ L’immunothérapie anticancéreuse a pour but d’augmenter la reconnaissance du cancer comme étant un corps étranger, stimule la réponse immunitaire et enlève l’inhibition du système immunitaire ; inhibition qui permet la tolérance, la survie et la croissance tumorale.


2/L’inhibition des points de contrôle immunitaire a montré des résultats dans le traitement des CNPC à un stade avancé et est intégrée dans l’approche clinique pour la prise en charge des CNPC du poumon :


a/ Les patients qui n’ont pas reçu de traitement systémique pour le CNPC avancé et n’ayant pas de contre-indications à l’immunothérapie (par ex, une condition auto immune active nécessitant un traitement immunosuppresseur), les auteurs proposent de déterminer le statut de PD-L1 EN IHC, utilisant le 22C3 de Dako.


b/ Les patients n’ayant pas de mutations EGFR ou réarrangement ALK et pour lesquels plus de 50%  de cellules tumorales sont exprimées en IHC, les auteurs recommandent un traitement par PEMBROLIZUMAB (KEYTRUDA)


c/ Les patients n’ayant pas de mutation activatrice et ayant progressé sous chimiothérapie initiale pour les CNPC avancés, les auteurs recommandent une immunothérapie anti PD-1 ou anti PD-L1.


d/Les patients ayant une mutation EGFR ou réarrangement ALK, ayant progressé sous traitements ciblés, de même qu’avec au moins une ligne de chimiothérapie, les auteurs proposent une immunothérapie et/ou d’autres lignes de chimiothérapie ; options thérapeutiques acceptables.


e/ Les patients qui ont progressé sous chimiothérapie et qui vont recevoir une immunothérapie de type NIVOLUMAB ou ATEZOLIZUMAB sont ses options thérapeutiques acceptables (indépendamment de l’expression de PD-L1 en IHC).


Si PD-L1+ dans au moins 1% des cellules tumorales avec le 22C3, le PEMBROLIZUMAB est une option thérapeutique.


De multiples inhibiteurs de points de contrôle immunitaires sont actuellement en cours de développement aussi bien en monothérapie ou en combinaison avec d’autres immunothérapies, chimiothérapies, thérapies ciblées ou radiothérapies.