samedi 17 octobre 2015

IMMUNOTHERAPIE DANS LES CANCERS BRONCHO PULMONAIRES



L'immunothérapie a été mise en avant récemment dans les carcinomes non à petites cellules (CNPC) du poumon dès lors qu'on a bien compris, à travers les mécanismes de la réponse immunitaire, que ce type de cancer est une maladie “targetable” par des molécules qui bloquent les points de contrôle ou “check points” immunitaires.

Rappel:
Les lymphocytes T jouent un rôle effecteur-like primordial dans ce réseau complexe qu'est le système immunitaire.
Ces cellules entravent le développement de la tumeur, mais malheureusement, les tumeurs se défendent via ce qu'on appelle des points de contrôle immunitaires comme le CTLA-4, le PD-1 et le PD-L1.
On sait que le CNPC du poumon induit des modifications pro tumorogéniques pour fuir le système immunitaire.
Les inhibiteurs des points de contrôle immunitaire peuvent restaurer les réponses T cellulaires et par conséquent entravent l'évasion tumorale des CNPC.

Mécanismes de PD-1 et PD-L1 comme immunothérapie dans les cancers:

PD-1 ou “Programm Death”- 1, est une protéine transmembranaire, de la superfamille Ig.
Etant exprimée dans les types cellulaires immunitaires activés, tel que les cellules T, B, NK (natural killers), cellules dendritiques (CD), macrophages et les tissus hôtes, l'expression des cellules T effectrices est associée à une exposition antigénique constitutive et donc PD-1 est considérée comme un marqueur de l'épuisement et de la non réponse des cellules T.

PD-1 (CD279), a deux ligands connus: PD-L1 et PD-L2 (CD274, B7-H1 et CD273, B7-DC), qui appartiennent à la famille B7.

PD-L1 est le ligand principal et il est exprimé dans les cellules hématopoïétiques incluant les cellules T, les cellules B, les cellules dendritiques (CD), les macrophages et les mastocytes ainsi que les cellules non hématopoïétiques tel que les cellules endothéliales et beaucoup de cellules épithéliales.

PD-L1 est exprimé dans beaucoup de tumeurs incluant les cancers développés dans différents organes comme ceux de la tête et cou, le poumon, l'estomac, le colon, le pancréas, le sein, le rein, la vessie, l'ovaire, le col utérin, de même que dans les mélanomes, le glioblastome, le myélome multiple, le lymphome et dans variétés de leucémies, inhibant ainsi les réponses immunitaires anti tumorales véhiculées par les cellules T exprimant PD1.

PD-1 et PD-L1, interagissent entre eux, inhibant donc l'expression de multiples facteurs de transcription des cellules T, comme la GATA-3 par exemple.

En plus, l'interaction de PD-1/PD-L1 inhibe la prolifération, la survie et la fonction effectrice des lymphocytes cyto toxiques CD8+ (CTL), induisant ainsi l'apoptose des cellules infiltrantes T intra/péritumorales  

Par ailleurs, il a été démontré que l'expression de PD-L1, joue un rôle critique dans la différenciation des cellules T régulatrices ou Tregs et dans le maintien de leur fonction suppressive.
Parce que les cellules Tregs  constituent un important agent inhibiteur de la réponse immunitaire tumorale spécifique dans le micro environnement tumoral, la génération des  cellules Tregs-PD-1/PD-L1, peut constituer une autre voie de protection quant à l'évasion tumorale. Par conséquent, le blocage de PD-1 ou de PD-L1, peut aider à stimuler l'activité anti tumorale, à la fois via les cellules T effectrices et via l'inhibition des Tregs.
A noter aussi, l'interaction PD-1/PD-L1 peut promouvoir la diférenciation des cellules T CD4+ en Tregs FOXP3, supprimant par ce biais, le système immunitaire, ce qui amène à une tolérance immunitaire péiphérique chez les patients porteurs de cancer.
A une échelle moléculaire, les cellules tumorales peuvent activer l'expression de PD-L1 via multiples voies de signalisation oncogénique.

PD-1/PD-L1, pris ensemble, leur interaction joue donc un rôle important dans la réduction des cellules T spécifiques, apoptose, inhibition de la réponse immunitaire vis à vis des tumeurs et dans l'évasion immune des tumeurs.
Le caractère inhibiteur de la voie PD-1/PD-L1 peut donc entraver la prolifération des cellules T effectrices activées,  causant ainsi l'évasion tumorale des cellules CTLs “tueuses”, aboutissant ainsi à l'affaiblissement de la réponse immunitaire anti tumorale.


BLOCAGE DE PD-L1 DANS L'IMMUNOTHERAPIE ANTI CANCEREUSE
Sachant que le PD-1 est hautement exprimé sur les lymphocytes des tumeurs infiltrantes humaines et les lymphocytes T circulants tumeur-spécifiques  et que l'expression de PD-L1 est corrélée avec le pronostic dans beaucoup de cancers, suggérant par la même occasion qu'une telle expression constitue un mécanisme de l'évasion tumorale, il est donc raisonnable de considérer que le blocage de l'interaction PD-1/PD-L1, peut être un faceur prometteur d'immunothérapie anti cancéreuse.
Ceci a été démontré dans beaucoup d'expériences où entre autre, le blocage de PD-L1 peut promouvoir la destruction par la voie immunitaire des tumeurs qui expriment le PD-L1.
Dans l'ensemble, le blocage thérapeutique de PD-1 ou PD-L1 permet d'améliorer les réponses immunitaires anti tumorales des cellules T effectrices.

ETUDES DANS LE CNPC
La surexpression de PD-1 sur les cellules T CD8+, dans les CNPC, suggère une réduction de la production des cytokines variées et la prolifération des cellules T.
Une expression anormale de PD-L1 a été identifiée dans 19% à 100% des cas de CNPC et elle est associée à un mauvais pronostic.
Par ailleurs, les cellules PD-L1+ sont remarquablement plus augmentées comparées au parenchyme pulmonaire normal adjacent et l'expression de PD-L1 dans les cellules des CNPC, est également corrélée avec un mauvais pronostic et une diminution de la survie globale.
Par conséquent il est logique d'indiquer que le blocage des interaction PD-1 permet aux lymphocytes T tumeur-spécifiques de libérer toutes leurs armatures de leur fonction effectrice sur les cellules des CNPC.

A ce jour, quelques anticorps inhibant la voie PD-1, pour bloquer le PD-1 ou le PD-L1 ont été élaborés. Citons en 2: LE NIVOLUMAB et LE LAMBROLIZUMAB, qui sont deux anticorps humains ou “humanéisés”, dirigés contre le PD-1.
Seulement une catégorie de patients répondent aux anticorps bloquant le PD-1.

CORRELATIONS ENTRE L'EXPRESSION DE PD-1/PD-L1 ET L'EXPRESSION DE EGFR/KRAS
Dans la limite des études actuelles, non seulement l'EGFR, mais aussi d'autres gènes comme le KRAS, le BRAF ou l'ALK, ne constituent pas de biomarqueurs satisfaisants pour  évaluer les effets de blocage de la voie PD-1/PD-L1.
Certains auteurs considèrent que la présence de mutations EGFR, induit une expression de PD-L1, aidant ainsi les cellules du CNPC à s'évader de la réponse immunitaire, alors d'autres pensent qu'il n'y a pas de relation cause à effet.
Les patients PD-L1+ auraient une haute sensibilité aux TKI en terme de progression de la maladie et de survie globale, que ceux qui sont PD-L1-.

Des anticorps IHC existent déjà et pourraient être explorés dans l'avenir:

Vectastain ABC kits; Vector Laboratories, Burlingame, CA:
PD-L1 Anti-B7-H1 (MIH1)
PD-L2 anti-B7-DC (MIH14)
anti-PD-1 (MIH4) 
Référence:
B7-H1 Expression on Non-Small Cell Lung Cancer Cells and Its Relationship with Tumor-Infiltrating Lymphocytes and Their PD-1 Expression
Jun Konishi
Clin Cancer Res August 1, 2004 10; 5094